SECTEUR DE LA BRUYÈREParoisse Saint Martin de Warisoulx |
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À
l’image d’autres paroisses du secteur, celle de Warisoulx
ne conserve véritablement aucune trace matérielle de son
lointain passé médiéval. Pareillement à
Bovesse vis-à-vis de Saint-Denis,
la taille réduite de la communauté villageoise ainsi que
le rayonnement important de l’église mère de Frizet
en sont vraisemblablement les causes. Aujourd’hui à l’état
de ruines, l’église Saint-Martin de Frizet
témoigne encore d’une rare richesse architecturale pour
la région, marque évidente de sa vigueur passée.
Composé essentiellement de terres et de prés humides ainsi que de vastes domaines boisés, le territoire de Warisoulx aurait fait partie du fiscus de Vedrin, ancien domaine carolingien. Néanmoins, rien aujourd’hui ne permet de prouver pour cette époque l’existence d’une résidence seigneuriale. À la fin du XIII ème siècle, tout comme Villers-lez-Heest, Warisoulx est politiquement possédée par le comte de Namur qui y exerce ses droits sur la plupart des habitants. Du point de vue religieux, on ne peut véritablement parler de paroisse à Warisoulx pour cette époque. En effet, ce territoire dépend directement de l’importante et ancienne paroisse Saint-Martin de Frizet éloignée d’environ cinq kilomètres et dont l’origine remonterait au VIII ème siècle. Véritable église mère, outre sur Warisoulx, Frizet exerce sa tutelle également sur Vedrin, Saint-Marc, Daussoulx, Cognelée et Champion. Frizet est par ailleurs liée au diocèse de Liège (1305-1559) durant tout l’essor et le déclin du Moyen-Âge. La petite communauté de Warisoulx ne dispose vraisemblablement à ce moment-là que d’une chapelle et d’un cimetière.
Au XVI ème siècle, la tutelle de Liège prend fin. Une réorganisation de la cartographie religieuse s'impose. D'une part, la répartition des circonscriptions ecclésiastiques de nos régions (treize diocèses) remontant pour la plupart à l'époque romaine ainsi qu'au Haut Moyen-Âge ne correspond plus du tout au découpage politique des XVII Provinces. À ce moment, les treize diocèses dépendent de trois provinces ecclésiastiques situées hors du pays : Cologne, Trèves et Reims. Le diocèse de Liège, bien plus étendu que la Principauté de Liège elle-même, dépend plus particulièrement de l’archevêché de Cologne. Cette organisation ne tient d’ailleurs compte ni des langues parlées, ni de l'accroissement démographique. Une telle organisation chaotique génère nécessairement des problèmes de communication, particulièrement handicapants dans une Europe secouée par les idées des réformateurs. Les visites irrégulières dans les paroisses n'assurent plus vraiment aux autorités ecclésiastiques un contrôle efficace du clergé. D'autre part, depuis l'hérésie de Luther au début du siècle, les progrès du protestantisme préoccupent avec acuité nos souverains catholiques, Charles Quint puis Philippe II. Comment « sauver » ce qui reste à sauver du catholicisme ? Une réorganisation rigoureuse de la répartition des diocèses donnerait ainsi une plus forte cohésion aux XVII Provinces et assurerait au souverain la nomination - et le contrôle partiel ! - du corps épiscopal. Un tel remaniement constituerait dès lors une arme efficace pour juguler les idées novatrices des réformés, un réel tremplin pour les idées de la Réforme catholique. Le 12 mai 1559, le pape Paul IV consent à la réorganisation des évêchés dans nos régions. La bulle Super Universas supprime l'ancienne répartition et subdivise le territoire de nos régions en trois provinces ecclésiastiques en tenant notamment compte de l'aspect linguistique : voient ainsi le jour les archevêchés de Malines, Utrecht et Cambrai - ce dernier incluant les nouveaux diocèses d’Arras, Tournai, Saint-Omer et celui de Namur. À la mort de Paul IV (1559), le nouveau pape Pie IV confirme la bulle de son prédécesseur. Les limites du nouveau diocèse de Namur sont définies. Bien que cette délimitation religieuse n’ait que peu à voir avec les limites de l’évêché d’aujourd’hui, les sept paroisses de notre secteur actuel de Meux-Rhisnes y sont déjà incluses. Le Projet de dotation et de circonscription de 1560 prévoit la tutelle de l’évêché de Namur sur : Bonesche, Esmynes (et hameau de Huglise), Meux (et hameaux de Mehaignoulle, Scley et Trypsee), Rysnes, Saint-Denys (et hameau de Isnes-Sauvages – bien que certains textes en fassent une dépendance de Bossière), Viller le heste et Waristoul. La bulle Ex Injucto (11 mars 1561) en assure l’application. Le Registra Vaticana de cette même année fait mention de la création des paroisses suivantes : Bovesche, Lesmynes (et hameau de Huglise – Saint-Martin-Huglise), Meux (Scley – Sclefhaie), Rysnes, S. Denis, Viller le Heste et Waristoul. Toute cette réorganisation fait inévitablement ombrage aux anciens privilèges : ceux de la noblesse, ceux des abbayes brabançonnes - dont ceux de Villers-la-Ville, abbaye ayant détenu les droits de corvée sur la ferme d’Ostin - et particulièrement ceux des évêques liégeois. En 1562, le chapitre de Saint-Lambert s’oppose d’ailleurs fermement à l’installation du premier évêque de Namur. Quelques chanoines et le doyen du chapitre de Saint-Aubain sont même menacés par la justice liégeoise sans que toute cette affaire ne tracasse les ouailles de nos paroisses. Quoi qu’il en soit, ce remaniement territorial mené parallèlement au catholique Concile de Trente atteint son but : un meilleur contrôle du clergé dans la lutte contre la dissidence protestante. Les diocèses sont maintenant subdivisés en entités inférieures, les doyennés, ceux-ci étant constitués des différentes paroisses dont le guide avait « charge d’âme » (cura animorum). C’est d’ailleurs de cette appellation que dérive le terme de « curé ».
En 1708-1709,
l’abbé Delstanche de Frizet édifie un presbytère
à Warisoulx et y installe un vicaire à
demeure. Une convention entre la paroisse et les habitants du village
assure un revenu annuel au vicaire. En échange, celui-ci s’engage
à ne plus réclamer d’aumônes excessives. Le
vicaire est en même temps tenu… d’apprendre à
lire et à écrire !
En 1794, à la suite des troubles révolutionnaires secouant notre puissant voisin français et conséquemment à la victoire française de Fleurus face aux Autrichiens, la « Belgique » est annexée. Warisoulx devient un territoire du département de Sambre-et-Meuse et subit dès lors la vindicte des lois françaises, notamment les lois restrictives au niveau de la pratique du culte. Comme à Saint-Denis et à Meux, cette politique républicaine ne convient guère au ministre du culte en charge des âmes de Warisoulx. En principe tenu de prêter serment comme tous les ministres du culte, le vicaire Jean-Félix Oversacq refuse en fait de faire allégeance au nouveau régime. Il est arrêté et emmené manu militari par la force publique. N’acceptant pas cette situation de fait, quelques audacieux villageois font acte de « résistance » en n’hésitant pas à faire feu sur les gendarmes. Oversacq est ainsi libéré sur la route le menant à Namur. La réaction des autorités ne se fait pas attendre : « Il résulte qu’après l’arrestation du nommé Oversaque (sic) (Jean-Félix), ex-vicaire et habitant de Warisoulx, canton d’Émines, pendant son transport dans les prisons de Namur, et en traversant un bois voisin de ladite commune, ils furent attendus par plusieurs individus de cette commune armés et assaillis par des coups de fusil. Considérant qu’il est de l’intérêt commun de réprimer un acte de rébellion aussi marqué, et qui tend à empêcher l’exécution des mesures ordonnées par le gouvernement ; déclare et met en état de siège la commune de Warisoulx, canton d’Émines, département de Sambre et Meuse. Tous les cantons et communes du département qui oseraient contrevenir aux lois de la République subiront le même sort. Tous les habitants de ladite commune qui seraient suspects d’avoir pris part à l’attentat commis envers la gendarmerie nationale, seront sur le champ arrêtés et conduits dans les prisons de Namur. Les troupes seront nourries et logées par les habitants de cette commune dans les proportions suivantes, à savoir : le pain et la viande de campagne, une bouteille de bière, et une ration d’eau de vie par homme et par jour. » Le placard est d’ailleurs affiché dans toutes les communes du département, mais rien n’y fait. Personne n’est arrêté et afin de retrouver la sérénité, la communauté villageoise cède aux autorités françaises les trois cloches de sa chapelle. En 1801, conséquemment à la signature du Concordat entre Bonaparte et le Saint-Siège, bien que sous conditions, le culte catholique est rétabli. Les paroisses sont réorganisées en fonction de la législation concordataire de 1803-1804, puis de 1807-1808. Napoléon reconnaît les nouvelles circonscriptions paroissiales arrêtées par les évêques, en accord avec les préfets.
Attachée au diocèse de Namur, la paroisse Saint-Martin de Frizet est rétablie en 1808. Bien que conservant ses six anciennes dépendances, dont celle de Warisoulx, l’église mère de Frizet va successivement les perdre une à une. Après l’érection en chapellenie en 1821, c’est d’ailleurs Warisoulx qui initie le mouvement : attaché au doyenné de Namur en 1837, le vicariat est séparé de Frizet en 1842-1843 et est institué en cure indépendante (arrêté royal du 11 juillet 1842 et décret épiscopal daté du 27 avril 1843), donnant ainsi naissance à la nouvelle paroisse Saint-Martin. Les autres succursales de Frizet suivent le mouvement : Vedrin en 1844, Champion en 1846, Daussoulx en 1878, Cognelée en 1896 et enfin Saint-Marc en 1897 - cette dernière causant ainsi de facto la disparition définitive de la paroisse même de Frizet dont l’église est d’ailleurs désaffectée en 1900. L’année 1842 est endeuillée par la disparition de J.-J.Garot, vicaire chapelain de Warisoulx. Son faire-part de décès est particulièrement élogieux et témoigne par ailleurs d’une présence certaine du personnage dans le secteur actuel de La Bruyère : « L’an de grâce 1842, le 19 novembre, est décédé à Warisoulx, administré des Sacrements, dans la 86ème année de son âge, MONSIEUR JEAN-JOSEPH GAROT, CHAPELAIN DE WARISOULX, Né (sic) au château de St-Martin-Euglise, paroisse de St-Denis, de parents recommandables par leur piété, il fut de bonne heure formé à la vertu par leur exemple, joignant la douceur à la modestie, des mœurs simples ; il rendait ces belles qualités plus intéressantes encore, par une piété tendre, une foi vive et une charité généreuse. Sa grande humilité le fit pencher pour la vie monastique et se fît religieux de l’Ordre de Saint François (sic), c’est dans un cloître qu’il aurait désiré de finir sa carrière, mai (sic) de fâcheuses circonstances ayant amené la destruction de ces sortes de maisons, il supporta avec résignation les atrocités de l’époque [claire allusion à la Révolution française], rendu à la liberté il fut préposé à Saint Denis (sic) et à Meux, comme vicaire, l’espace de 17 ans environ, chapelain à Warisoulx pendant 25 ans et demi. Partout i (sic) déploya beaucoup de zèle, prêcha la vertu avec succès : que de pécheurs il a rappelés dans le chemin (sic) du salut pendant sa longue carrière (63 ans de prêtrise), épuisé de travaux, comblé de mérites, miné par les infirmités de la vieillesse, où sa patience ne se démenti (sic) jamais, il se prépara à la mort avec la résignation, la confiance et les espérances qu’elle inspire, regretté de tous ceux qui l’ont connu ; il est allé, nous l’espérons, recueillir la récompense de ses travaux. Mais les décrets de Dieu étant (sic) impénétrables et rien de souillé ne pouvant entrer dans le Ciel, nous le recommandons à vos pières (sic) et bonnes œuvres, afin que s’il lui restait quelques fautes légères à expier, il fut (sic) aussitôt délivré. Qu’il repose en paix. »
L’abbé
Potier est désigné comme premier curé de la nouvelle
paroisse. De 1842 à 1871, il s’attache à doter le
village d’une nouvelle église. L’ancienne chapelle
est abandonnée en raison de sa vétusté et de son
exiguïté. Le culte est entre-temps célébré
dans une dépendance de la ferme de J.-B. Marchal - actuellement
au n° 12 de la Rue de Namur.
Collecte
des informations, texte & photos : E. Lw. (janvier 2005)
R.
DELOOZ, La Bruyère. Commune du Namurois, Namur, 1986. |
Qui ne
connaît le légionnaire au manteau partagé ? Martin est le symboIe même de la charité intelligente
et totale. Quand, à la porte d'Amiens, ce pauvre se dresse devant
lui, le vaillant soldat n'a aucun argent... Qu'à cela ne tienne
! Il fait froid ; son cœur plein de compassion ne peut laisser
la demande sans réponse. Et c'est le beau coup d'épée
dont la promptitude force aujourd'hui encore notre admiration.
Charité chrétienne s'il en est... avant pourtant que d'être baptisé, car Martin est encore catéchumène. Tandis qu'il s'en va dans la bise coupante, se couvrant au mieux du pan de chlamyde qui lui reste, une étonnante chaleur l'envahit. Nous savons la suite : Jésus lui-même apparaissant au jeune homme, revêtu du manteau et déclarant que c'est bien lui qui l'a reçu. À dix-huit ans, Martin est baptisé. C'est alors qu'il renonce à l'armée, à la grande déception de ceux qui l'apprécient. Mais il a soif de servir un autre chef que le César régnant. Puisque c'est en Gaule qu'il se trouve - bien qu'il soit de la Pannonie, c'est-à-dire hongrois, de naissance - le voilà devant Hilaire, évêque de Poitiers, s'en remettant à lui pour la conduite de sa vie qu'il veut consacrer à Dieu. Le saint évêque transforme en moine le bouillant légionnaire des armées romaines. Devenu à son tour évêque de Poitiers, puis de Tours, Martin continue de mener la vie monacale et construit plusieurs monastères. Ils sont bientôt quatre-vingts hommes qui y vivent sous sa direction forte et sage, s'épaulant mutuellement pour évangéliser le pays et gravir aussi les degrés de la sainteté. Gravement malade après une longue vie pleine de mérites, Martin aspire à la mort qui le réunira à Dieu. Mais devant les supplications de ses frères il se reprend, oublieux de lui jusqu'au bout, pour prononcer la fameuse parole : « Seigneur, si ton peuple a encore besoin de moi, je ne refuse pas le travail.» (« Non recuso a laborem. »). Cette ultime leçon que nous donne saint Martin est peut-être la plus intéressante à contempler et à assimiler. Ecrasé d'ans et de travaux, sentant son âme prête à quitter la prison de son à corps, désirant de toute son ardeur voir enfin ce Dieu qui lui est tout, il accepte volontiers un nouveau délai, pourvu que sa présence prolongée puisse être utile. Il sait que chaque jour vécu sur terre peut perpétuer la louange divine, faire monter le niveau spirituel de l'humanité, faire connaître Dieu davantage et continuer la mise en œuvre des mérites infinis du Christ au profit des hommes. Dans cette perspective, quelques années ou même quelques jours de plus peuvent être singulièrement bénéfiques. Ainsi fut le grand saint Martin, prêt à mourir et prêt à vivre, acceptant d'un cœur égal l'un ou l'autre au jugement de Dieu. Ainsi mérita-t-il cette vague extraordinaire de dévotion qui déferla sur lui et que Dieu confirma par nombre de prodiges éclatants. Il est un des saints les plus connus et aimés de France. Mais nous n'aurons garde d'oublier son pays d'origine qui, comme la France, a tant besoin de son aide. Saint Martin, obtenez-nous la vraie charité pour Dieu, pour tous nos frères en humanité et protégez spécialement ces deux nations qui sont vôtres : la Hongrie - la France. Source
: RICHOMME, A., MARTIN,
évêque de Tours (Sabaria, Pannonie, v. 315- Candes, Touraine,
397). Nous connaissons saint Martin surtout par son ami Sulpice Sévère,
dont le genre littéraire semble se complaire dans les aventures
extraordinaires et les miracles, mais dont la véracité
- pour le fond - ne peut être niée. Une fois débarrassée
des invraisemblances, la vie de saint Martin nous apparait comme celle
du père du monachisme français et de l'introducteur du
christianisme dans la Gaule romaine.
Fils d'un tribun militaire, enrôlé lui-même à quinze ans, Martin sert dans la garde de l'empereur. À Amiens, où il est un moment cantonné, il partage son manteau avec un pauvre ; la nuit suivante, Jésus lui serait apparu portant la moitié du manteau. Baptisé, libéré, Martin vient à Poitiers, où l'attire le renom de l'évêque saint Hilaire, qui l'ordonne exorciste. Durant l'exil d'Hilaire en Orient (356), Martin retourne en Pannonie, où il convertit sa mère et combat l'arianisme. Après un séjour malheureux en Italie, il regagne Poitiers, où est revenu Hilaire. Avec l'appui de ce dernier, Martin crée un monastère à Ligugé - le premier dans la Gaule centrale - où des disciples se joignent à lui, et d'où sa renommée se répand à travers la Gaule. Nonobstant son extérieur peu soigné, son allure de « paysan du Danube »., Martin est élu évêque de Tours (371). Il n'en reste pas moins fidèle à son idéal monastique, et son point d'attache sera le monastère de Marmoutier, fondé par lui et qui deviendra une pépinière de missionnaires. L'épiscopat de Martin marque le triomphe du christianisme dans l'ouest de la Gaule ; ses tournées missionnaires aboutissent à l'organisation des premières paroisses rurales et à la création de nombreux monastères. Par son ascendant, il convertit nombre de grands personnages de la Gaule romaine, tel Paulin de Bordeaux (de Noie). Cependant, surtout dans ses dernières années, il souffre des attaques dont il.est l'objet de la part, notamment, d'évêques moins zélés ou plus mondains. Martin tombe mortellement malade à Candes ; il rend son âme à Dieu entouré de ses disciples. On l'inhume à Tours, où son tombeau devient tout de suite un centre de pèlerinage. Aucun saint, d'ailleurs, ne sera plus populaire en France : il a donné son nom à 485 bourgs ou villages et à 3 667 paroisses de ce pays. - Fête le 11 novembre. Source
: PIERRARD, P.,
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